Ma chère Hippolyte, A Vienne, je fus cette fois encore bien confus des propos et de l'attitude de mon ami le Comte Don Juan le comte de Foste, que le Commandant Franz Von Suppé des Cavaliers Légers de Roddenbach invita à le rejoindre pour une sortie avec quelques futurs officiers de l'académie qui seraient incorporés à son régiment. Contrairement à la tradition les chevaux qui nous furent confiés n'étaient pas issus des écuries de l'académie renommée pour ces splendides lipizans, aux magnifiques allures mais un ensemble de chevaux dont quelques entiers rouans que le maître d'écurie nous suggéra en nous demandant si nous les accepterions car ils étaient bien mis et nous n'aurions aucune peine à les placer. N'ayant aucune appréhension particulière pour les chevaux issu de cette ville française, j'acceptai avec reconnaissance la monture docile qui me fut présentée. Me demander si j'accepterais un cheval entier ! Qu'aurais-je d'ailleurs fait d'une fraction de cheval? prendre un autre cavalier en croupe pour reconstituer un animal entier et complet ? Don Juan ne se montra pas au départ nous faisant savoir qu'il nous rejoindrait plus tard. Les éclaireurs en avant, les cadets bien groupés précédant les mules d'intendance mises en fin de colonne, nous prîmes le départ, et ayant toujours quelque fringale à calmer je me plaçai en arrière du groupe. Vers le soir nous atteignîmes le poste relais où nos chevaux trouvèrent le repos dans des stalles d'une rigueur spartiate, pas le moindre élément distinctif , pas la plus petite décoration, que l'efficacité seule peut elle être monotone. Enfin au moins nos chevaux seraient ils à l'abri et bien nourris. Avant de m'éloigner je notai consciencieusement que ma monture était la sixième dans sa rangée entre celle de l'ordonnance et celle du commandant, les éclaireurs occupant les premières places dans la rangée. La soirée heureusement fut plus animée que le logis
ne l'aurait laissé présager.
Nanti de ce précieux renseignement je parcourus les stalles, à la recherche dans la centaine de chevaux de celui de mon ami. J'en vu des grands, des petits, des bruns, des noirs, des bruns, avec des taches sur le front, sur le museau, aux jambes, mais aucun n'était muni de ce fameux écrit de la main de mon ami. Désespérant je m'éloignais confessant mon échec quand mon attention fut attirée par un hennissement plaintif provenant de l'autre côté de la cour. Je m'approchai et trouvai un cheval gris aux jambes protégées par des bottes épaisses, seul dans un enclos bien protégé par de la paille et près duquel un écriteau que je déchiffrai avec difficulté mentionnait lus je "courage : nettoyer sole et fourchette; petite lacune; bien arroser la muraille" Agréablement surpris par le luxe de précautions dont ce cheval était entouré, j'en conclu que la paresse et pourboire devaient être proportionnels au penchant pour la boisson de Don Juan (une fine lame mais une véritable éponge qui ne fait pas de quartier quand il s'épand et pince les mamelles de la vigne) et reconnaissant bien las son appétit de gourmet, je présumais sans risque de me tromper cette fois que bien soigné, c'était son cheval qui occupait ce boxe protégé par une épaisse couverture d'un noir jais profond que rehaussaient comme broderie de pourpoint l'or de quelques brins de paille qui brillaient aux rayons de l'aube naissante . Toutefois ayant également mon cheval à préparer j'avisai Sössi Mayhoppe, l'un des éclaireurs menant hors des écuries sa monture déjà prête pour l'abreuver, et lui demandai s'il consentait à s'occuper du cheval que je lui indiquerais. Soulagé d'avoir pu, à peu d'efforts, satisfaire aux devoirs de l'amitié, je retournai dans les stalles. Je m'occupais du sixième cheval dans la ligne quand le commandant me rejoignit et me remercia d'avoir songé à panser son cheval avant le mien, mais désignant l'éclaireur Sössi Mayhoppe, me demanda pourquoi donc j'avais enjoint à ce bon à rien de s'occuper d'un cheval réformé requérant les soins du vétérinaire et du maréchal ferrant. Je lui contai ma recherche et pour toute réponse il sourit, me complimenta pour mon altruisme et me conseilla de poursuivre en rejoignant le comte auquel je pourrais utilement tenir compagnie. Ma foi voilà bien récompensé la prévenance, chacun pense le cheval de l'autre car je bénéficiai ainsi d'une collation supplémentaire dans les murmures et les rires qui préludent aux grandes journées... Votre Candide |
Mon cher Candide; J'ai relaté votre méprise à notre ami Laplace et comme lui, pardonnez moi, si je souris également. Ne vous méprenez pas mon cher ami, en homme de robe que vous êtes, vous l'avocat des causes bien défendues, est-ce à vous que je dois rappeler ce que vous devez pourtant connaître et reconnaître comme faisant partie de votre seconde langue maternelle : les termes équestres. Le cheval est un placement onéreux, cela votre économe vous le confirmera mais "placer" un cheval est tout autre. Cavalier et monture se positionnent dans un groupe. Un cavalier "place" son cheval en lui faisant adopter des attitudes bien définies. Il l'installe dans un boxe ou dans des stalles. Mon pauvre ami dire que si aviez confondu l'entrée des écuries avec leur sortie vous auriez travaillé sur la mule du cuisinier! En ami de l'ordre si dans une file le premier se retire vous auriez dû vous souvenir mon ami que le deuxième ne reste pas seconde en place que le troisième ne soit à sa place me rappelle notre ami le mathématicien Laplace, quant à l'avant dernier, il restera l'antépénultième à moins que le dernier ne soit rejoint d'un surnuméraire. Dans les troupeaux de chevaux sauvages la jument dominante est généralement en tête suivie du troupeau que protège l'étalon dominant qui pousse devant lui les retardataires. Laissés libres de définir leur positions dans un groupe les chevaux même montés ont une tendance à reproduire un tel ordre lors de leurs déplacements. Quant aux robes, elles décrivent la couleur du cheval, blanc, noir, alezan (brun uniforme), café au lait (crème), bai (corps brun, crins noirs), Isabelle (corps café au lait, crins noirs), souris (corps gris, crins noirs), Aubère (mélange de poils bruns et noirs), louvet (mélange de poils noirs et alezans), rouan (mélange de poils noirs, blancs et alezans). Une robe rouan, n'a donc rien à voir avec une origine française, pas plus qu'avec une pièce de vêtement. Votre tâche s'est trouvée encore plus ardue de part votre confusion des taches. Un cheval avec des jambes d'une couleur distincte de sa robe porte des balzanes, une raie à la tête sera une étoile, une liste ou une belle face suivant la position et les dimensions de celle-ci. Votre ami don Juan , s'il montait un lipizan avait donc choisi pour vous rattraper un poulain, eux seuls sont noirs et le sien avait une longue tache blanche entre les yeux. Ce cheval gris objet de votre attention n'était donc pas le sien! Votre écriteau devait mentionner CURAGE (opération visant à nettoyer les pieds) (notez bien qu'il faut parfois du courage pour la mener à bien), la face inférieure du pied est débarrassée de toute matière adhérente, la sole (la voûte) est séparée de la fourchette par deux cavités : les lacunes. La muraille, les quartiers et les talons désignent la face externe du sabot visible (respectivement l'avant, les côtés et l'arrière) quand celui-ci est posé. Pour nettoyer le pied, tournez vous vers la croupe, placez votre épaule contre le membre du cheval, soutenez le pied par le dessous du boulet et au moyen du cure pied, nettoyer les moindres interstices de la sole. Ensuite brosser avec la brosse réservée à cet usage. Cette opération vous permettra aussi de vérifier l'état des memnbres et des ferrures, car pas de pied pas de cheval et les affections sont nombreuses. Vos chevaux furent je crois bien reposés, nourris, soignés, pansés pendant que vous prîtes votre collation, et ayant digéré, aptes à vous porter à tout prendre et supporter vos méprises heureusement corrigées par votre mentor. Votre Hippolyte
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