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Emprunter
n' est pas louer
L'emprunteur d'un cheval s'expose à certains devoirs
que le locataire ignore
L 'emprunteur d'un cheval s'engage à en user -en
bon père de famille Encore faudrait il que ce dernier soit un homme
de cheval non ?
On lira avec intérêt le jugement ci-dessous définissant d'une façon particulièrement claire et convaincante le lien juridique qui se forme, même tacitement, entre le prêteur et l' emprunteur d'un cheval, à titre gratuit.
En l'espèce, le demandeur avait prêté au fils mineur de la défenderesse, un cheval sortant de longues semaines en prairie, et que la défenderesse n'avait pas hésité à entraîner dans une longue promenade de plus de deux heures et dont le cheval était rentré dans un état d'épuisement tel qu'il décéda 2jours plus tard.
La défenderesse contestait l'existence d'un contrat de commodat ou prêt à usage, et soute- naît que son fils était ''l'entrepreneur du demandeur " n'ayant sorti le cheval qu'à la demande du propriétaire et pour lui rendre service.
Chaque cavalier comprendra l'intérêt majeur
de cette décisionjudiciaire
.Guy Weber, service juridique F F E
Le tribunal de première instance séant à Nivelles
En audience publique de la Onzième Chambre, affaires civile, du vendredi 13 février 1998
à laquelle siégeait J. della Faille de Leverghem, juge, Juge unique,
Monsieur Ph. Foucart Greffier,
a rendu le jugement suivant, application de la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues en matière judiciaire ayant été faite,
en la cause n° 54599 du rôle général :
Le dénommé (...), demandeur, comparaissant en personne assisté de Maître Guy Weber
Vu la citation du 6 mai 1996 vu les conclusions et le
dossier du demandeur, vu les conclusions et le dossier de la défen-
deresse, ouï les parties en leurs dires et moyens, .....
Attendu que la demande a pour objet la : condamnation
de la défenderesse à payer au demandeur la somme de
225.000 BEF en principal majorée des intérêts moratoires
(en réalité compensatoires) depuis le 17 avril : 1995, des
intérêts judiciaires depuis le 6 avril 1996 et des dépens,
à titre de dommages et intérêts suite à
la perte de son cheval dénommé Kouros,
Attendu que les éléments utilisés à l'appréciation du litige sont établis dans la mesure suivante :
-Le demandeur était propriétaire d'un pur- sang arabe hongre acheté en octobre I 993 au prix de 70.000 BEF qu'il entretenait lui-même chez lui;
-Le demandeur affirme qu'il avait amélioré la condition physique et l'endurance de ce cheval, acquis à l'âge de 12 ans ... en l'entraînant progressivement avant de participer à des initiations et randonnées: il affirme également que son cheval était en parfaite condition physique le 19 mars I995 jour des faits litigieux, tout en reconnaissant qu'il s'agissait de la première promenade de l'animal au terme d'une période de repos hivernal de 5 mois
Le 19 mars 1995, le cheval du demandeur fut mis à la disposition de la défenderesse et de son fils; celui-ci, âgé de, 15 ans. effectua une promenade avec ce cheval en compagnie de la défenderesse, qui montait son propre cheval ;
Au terme de cette promenade, le cheval présenta un état physique anormal caractérisé par des crises d'essoufflement avec jetages mousseux sanguinolents; après divers soins reçus le jour même par un vétérinaire de l'Université de Gand qui posa un diagnostique d'oedème pulmonaire sans qu'aucun traitement n'ait pu améliorer la condition du cheval qui décéda finalement le 17 avril 1995 ;
Attendu que le demandeur soutient avoir prêté son cheval à la défenderesse et à son fils tandis que celle-ci prétend que c'est le demandeur lui-même qui a demandé à son fils d'effectuer une sortie avec son cheval parce qu'il n'avait pu le monter depuis un certain temps suite à de problèmes de santé ;
Attendu que le demandeur invoque le contrat de commodat
au sens des articles 1875 et suivant du code civil tandis que la
défenderesse invoque un contrat d'entreprise au
sens des articles 1787 et suivant du code civil ;
Attendu que quelle que soit la personne qui en ai t pri s l' initiative , il est reconnu par chacune des parties qu'il y a eu mise à la disposition à titre gratuit par le demandeur à la défenderesse de son cheval KOUROS, en vue de permettre au fils de cette dernière d'en user à charge de le restituer ;
Que pareille convention constitue un prêt à usage,
Que la gratuité est de l'essence du commodat conformément -- à l'article 1876 du code civil tandis qu'elle ne l'est pas du contrat d'entreprise qui est une forme de contrat de louage dans le cadre duquelle paiement d'un certain prix est un élément déterminant (c.f. art. 1709 du code civil ) ;
Attendu que la défenderesse, reconnaissant les éléments constitutifs du contrat de commodat dans les déclarations faites à son assureur et par voie de conclusions, n'est plus fondée à se retrancher derrière l'absence de preuve écrite du dit contrat pour se soustraire aux obligations qui en découlent pour elle ;
Attendu qu'il résulte des articles 1875 et 1880 du code civil que le commodat impose à l'emprunteur l'o b ligati on d' u ser de la chose en bon père de famille et la restituer sans qu'elle soit détériorée, à moins qu'il n'établisse que la détérioration ou la perte de la chose résulte d'un cas fortuit, de l'absence de faute de sa part ou de vices propres de la chose ;
Que la défenderesse n'invoque pas le cas fortuit ;
Qu'elle n'établit pas l'absence de faute de sa part dans la mesure où elle ne rapporte pas la preuve que le cheval n'a pas été contraint à des effort excessifs par rapport à la longue période de repos dont il sortait : la défenderesse ne rapporte pas non plus la preuve d'un vice propre du cheval dans la mesure où rien ne permet d'établir que celui-ci n'était pas en bonne santé avant la promenade litigieuse même si le médecin vétérinaire Thonar dans un rapport unilatéral a envisagé l'hypothèses d'une déformation cardiaque préexistante dont les symptômes apparus à la fin de la promenade n'auraient été que le premier révélateur ;
Qu'il s'agit en effet d'une appréciation unilatérale contestée par le demandeur et non établie par des éléments probants tels que recueillis dans le cadre d'une expertise amiable contradictoire ou judiciaire ;
Qu'en conséquence, la demande d'indemnisation est établie en son principe ;
Attendu cependant qu'il appartient au demandeur de rapporter la preuve du préjudice résultant de la perte de son cheval : Que l'augmentation de valeur du cheval par rapport au prix d'acquisition payé par le demandeur, à savoir 70.000 BEF, n'est pas établie ;
Que les frais de soins réclamés à
concurrence de 15.000 BEF ne sont pas contestés :
Qu'enfin, tenant compte de ce que le demandeur possédait
ce cheval depuis un an et demi et qu' il l'entretenait lui - mê rne
et chez lui, un préjudice moral et d. agrément est justifié
à concurrence de 10.000 BEF ex aequo et bono ;
Qu'en conséquence, la demande est fondée
concurrence de 95.000 BEF en principal outre les intérêts
compensatoires puis judiciaires depuis le 17 av ril 1995 (date du décès
de l'animal ) .
par ces motifs Le Tribunal statuant contradictoirement
reçoit la demande et la déclare fondée dans la mesure
qui sui t :
Condamne la défenderesse à payer au demandeur
la somme de nonante cinq mille francs en principal majorée des intérêts
compensatoires au taux légal depuis le 17 avril 1995 jusqu'à
ce jour, ensuite des inrérêts judiciaires et des dépens
;
Liquide les dépens à 17.554 BEF pour le
demandeur et à 12.300 BEF pour la défenderesse.
J. della Faille de Leverghem, juge, Juge unique
Le jugement est définitif
La publication a eu lieu et constitue dès lors un élément de jurisprudence.
Protection des animaux : Loi du 14 Aout 1986
-autres informations sur la jurisprudence :
L.F.D.A. (Ligue Française des Droits de l'Animal) -
39, rue Claude Bernard - 75005 Paris - Tél. 01 47 07 98 99
Institut du droit Equin
Florence Peyer
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